Une soirée responsable

Ils ont tout compris les pères de familles bedonnant, les lecteurs de best-sellers? Tout le monde à envi d'être comme eux? Les libres penseurs associés ont la preuve que l'intelligence n'est pas un avantage.

Déjà dit à un con (droit dans les yeux): « pauvre con »? Déjà parti d'un restaurant sans payer? Déjà lu Proust? Déjà passé une nuit sur un banc? Déjà essayé le suicide? Jamais bloqué devant la pissotière? Non? Alors vous n'allez rien comprendre. Cette histoire n'est pas pour vous. Vous allez dire que je suis trop négatif, que cette histoire est absurde, qu'elle n'a aucun sens. Je ne vous dirais pas le contraire car je n'ai aucune envi de vous aider.

J'avais de l'argent, j'avais faim et je n'avais qu'une chose en tête : manger. Les filles qui passaient: je ne les remarquais pas. Les gens qui s'amusaient: je ne les remarquais pas. Les bruits, les voitures et les gazes d'échappements: je ne les remarquais pas. Je ne craignais qu'une chose : et si mon restaurant était plein avant que j'arrives?

J'ai mangé par bouchés énormes. Je mâchais, j'avalais, j'avalais. J'avais la bouche toujours pleine et je me réglais. C'était croustillant et tendre, pas des pâtes pleines d'eau: c'était du solide! Ni couteaux, ni fourchettes, je croquais dedans et le jus me coulait sur les doigts. Je me léchais les doigts. Si mon ventre me l'avait permis je serais encore en train de manger, je serais encore à ma table comme un bienheureux...

J'avais le ventre plein (je n'avais pas pris de dessert) et je digerais sur mon banc. Je rôtais, j'avais des pets merveilleux à l'odeur de poireaux. Je ne faisais attention à rien, je ne regardais rien, je ne désirais rien: ni filles, ni amis, ni bières, ni joins... Ma vue était trouble, les bruits étaient en sourdine, mon corps était léger et ma tête vide. Je senti le sommeil approcher. J'allais rentrer tôt: pour une fois.

Ce soir-là je n'allais pas dire les choses bêtes des ivrognes, je n'allais pas faire de scandale, je n'allais pas aller aux putes, je n'allais pas m'endormir dans les bars, on n'allait pas me mettre pas à la porte : pour une fois...

Si les gens de votre voisinage ne vous disent plus bonjour. Si vos collocataires vous jettent à la rue. Si les serveuses du coin vous montrent du doigt en riant, si le patron d'un bar de strip tease vous offre des verres, alors vous comprendrez ce que je veux dire.

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